Dans la dépression, il existe une dérégulation des émotions : soit elles ne sont plus accessibles (la personne ne ressent absolument rien), soit certaines sont trop intenses, comme la tristesse, au détriment d’autres absentes, comme la joie. Dans tous les cas, ces émotions dérégulées ont un rôle à jouer dans la dépression, aussi désagréables soient-elles.
Qu'est-ce qu'une émotion ?
Pour comprendre le rôle des émotions, il faut d’abord comprendre ce qu’elles sont. Apparues au cours de l’évolution, elles ont été retenues par la sélection naturelle car elles avaient une utilité dans notre survie. Il s’agit donc de « programmes internes » permettant d’adapter nos comportements face à une situation, dans le but de survivre.
Les émotions sont aussi une sorte d’énergie dans le corps. Elles viennent du latin emovere, qui veut dire mettre en mouvement. Les émotions sont donc là pour nous mettre en mouvement, nous animer. Ce sont elles qui colorent notre vie, avec ces joies et ces plaisirs, mais aussi ces colères et ces peurs.
La dérégulation des émotions dans la dépression
Survivre plutôt que vivre
Tout d’abord, si les émotions sont des « programmes internes » utiles à notre survie, il est intéressant de noter que dans la dépression, il n’y a plus l’envie de vivre. Or si les émotions sont dérégulées, elles ne remplissent plus donc plus leur rôle de « survie ». Dans le cas où une personne en dépression ne ressent plus aucune émotion, on comprendra pourquoi elle n’arrive pas à se motiver et à « bouger » puisque ce sont le rôle des émotions.
Il peut avoir de nombreuses raisons, chacune individuelle, de se couper de ses émotions et donc de la vie en soi. Les évènements stressants, les chocs, les deuils, les accidents, les traumatismes… sont tous des situations qui peuvent potentiellement venir nous bouleverser à tel point que nous n’arrivons plus à renouer avec la part de nous qui a envie de vivre.
« Les évènements stressants, les chocs, les deuils, les accidents, les traumatismes… sont tous des situations qui peuvent potentiellement venir nous bouleverser à tel point que nous n’arrivons plus à renouer avec la part de nous qui a envie de vivre. »
Les conséquences dans le corps et le cerveau
Lors de ces moments d’adversité, les émotions vécues peuvent être si fortes et si difficiles à supporter que nous préférons nous en couper totalement. Si c’est un mécanisme de survie et d’adaptation sur l’instant, ces émotions restées bloquées vont provoquer toute une série de problèmes sur le long terme : douleurs, problèmes de digestions (car nous n’avons pas « digéré » ces émotions trop fortes), maladies psychosomatiques, etc 1,2.
Le cerveau perçoit également l’émotion dans les parties subconscientes, notamment dans les régions cérébrales limbiques avec une suractivation de l’amygdale droite3, reflétant le fait qu’il y a des émotions intenses et/ou nombreuses à traiter. Néanmoins, le traitement et la régulation de ces émotions par le cortex préfrontal, notamment les parties ventrolatérales et dorsolatérales, sont perturbés3. Ainsi, les informations émotionnelles maintenues au niveau des amygdales ne pourront pas être résolues et restent comme « bloquées ». Sur le long terme, ces perturbations qui affectent le cerveau vont finir par être ressenties sous forme de symptômes connu dans la dépression : apathie, perte de plaisir, fatigue mentale, pertes de mémoire, etc.
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Le rôle du travail émotionnel
Se libérer de la souffrance du passé
Libérer les émotions du passé, c’est aussi libérer l’empreinte émotionnelle d’un évènement douloureux. Ce travail de libération est souvent délicat, car il réveille ce que nous avons enfoui en nous. La douleur et certains souvenirs désagréables peuvent alors réapparaître. Du fait de ce passage difficile et du sentiment de ne plus avoir envie de vivre, les personnes en dépression se trouvent souvent dans une impasse. Elles n’osent pas toujours traverser cette douleur et reste bloquées dans une existence monotone.
Suite au travail émotionnel, une partie des émotions très refoulées peuvent resurgir. C’est parfois le cas de la colère. Cette émotion, loin d’être négative, pourra être utilisée comme source d’énergie pour rebondir.
Renouer avec la vie en soi
Une fois les vieilles émotions libérées, notamment les émotions désagréables comme la tristesse, la colère ou la culpabilité, la joie peut progressivement réapparaître. La joie nous donne de l’énergie et de la motivation pour poursuivre nos projets. La joie est simplement l’expression de la vie qui jaillit en nous. La joie est l’émotion qui dit « continue, tu es sur la bonne voie ». La clé pour sortir de la dépression est donc de renouer avec sa joie et pour cela une reconnexion à soi (son corps, ses émotions, ses valeurs, ses aspirations…) est nécessaire.
« La joie est l’émotion qui dit « continues, tu es sur la bonne voie » »
Comment soigner une dépression naturellement ? En savoir plus
1 Henningsen, P., & Löwe, B. (2006). Depression, pain, and somatoform disorders. Current opinion in psychiatry, 19(1), 19–24.
2 Bener, A., Al-Kazaz, M., Ftouni, D., Al-Harthy, M. and Dafeeah, E.E. (2013), Overlap of mental disorders in Arab population. Asia-Pacific Psychiatry, 5: E29-E38.
3 Ebneabbasi A, Mahdipour M, Nejati V, et al (2021) Emotion processing and regulation in major depressive disorder: A 7T resting-state fMRI study. Hum Brain Mapp ; 42:797–810.