Difficile de prendre des décisions quand on est en dépression

Comment prendre des décisions quand on est déprimé

D’un point de vue extérieur, les personnes déprimées peuvent paraître indécises et semblent avoir des difficultés à mettre en place des actions bénéfiques pour leur santé. Leurs proches font parfois des reproches croyant qu’il y a simplement un manque de bonne volonté. Ceci n’aura pour effet que de les faire culpabiliser et se sentir encore plus désemparées. Pourtant la confusion mentale est bien réelle, on décrit souvent un cerveau qui serait comme « dans le brouillard », traduisant bien cette incapacité à y voir clair et mettre de l’ordre dans ses idées. Ceci n’aide donc pas à la prise de décision, ni à l’exécution des tâches quotidiennes normalement anodines, qui se transforment parfois en véritable parcours du combattant !

Ralentissement du « chef d’orchestre » cérébral

Toutes ces perturbations prennent leurs sources dans un cortex frontal au ralenti, siège du raisonnement, de la planification et de la prise de décision1. Il est communément observé une diminution de l’activité du cortex frontal des personnes en dépression2 et un ralentissement de cette même région par un surplu d’ondes lentes3. En effet, les ondes lentes (delta, theta et alpha) sont bénéfiques uniquement dans certaines conditions. Par exemple lorsque les ondes alpha se trouvent principalement à l’arrière de la tête, il y aura un effet relaxant. Si elles se trouvent à l’avant de la tête, notamment au niveau du front, cela ne fait que ralentir ce chef d’orchestre qu’est le cortex frontal, en plus d’indiquer un problème dans la gestion des émotions et dans la capacité à ressentir du plaisir.

A noter que s’il y a en plus des ruminations mentales, cela créera des interférences empêchant d’évaluer les différentes options qui s’offrent à la personne déprimée, ni d’avoir un esprit serein pour prendre une décision en toute clareté4.

Plaisir altéré et futur mal anticipé

L’incapacité à se projeter dans le futur empêche également de faire un choix, étant donné que la personne est tournée uniquement vers le passé. Ceci est appuyé par l’incapacité à ressentir de plaisir, notamment dû à une dysfonction du cortex cingulaire antérieur (très proche du cortex frontal). Prendre une décision qui engendrerait un bien-être futur est donc très compliquée. La personne n’arrive pas à s’imaginer et à évaluer l’apport positif du choix qui se présente à elle4. Il y a donc un défaut dans la capacité à juger correctement différents choix.

Le biais de négativité très marqué

Une dépression n’arrive pas par hasard, elle suit souvent un moment de vie difficile. Pour éviter à revivre une telle situation, le cerveau va développer une stratégie : éviter toutes situations qui présentent potentiellement des aspects négatifs ou dangereux. La personne ne voit donc plus que la partie vide du verre, incapable de voir la partie pleine. C’est ce qu’on appelle aussi le biais de négativité : le fait de voir en premier les aspects négatifs d’une situation. Les décisions se porteront donc sur les choix les plus simples et surtout les plus sécurisants. La zone de confort sera choisie par défaut. Il s’agit d’une stratégie de survie, plutôt que de bien-être, car ce qu’on appelle communément la « zone de confort », n’est pas toujours aussi confortable que l’on croit.

Il est donc difficile pour une personne dépressive de prendre des décisions rapides et raisonnées. Elle n’en est tout simplement pas capable car elle n’en a pas les ressources cognitives. Si elle prend finalement une décision, elle sera le plus souvent influencée par ses émotions ressenties sur le moment et ne pourra pas juger les conséquences sur le long terme. Dans une telle situation, il est donc préférable d’être au mieux accompagné par son entourage et des professionnels de santé ou thérapeutes bienveillants.

1 Steven W.K., Aspandiar F.D., Antonio H.L., Jonathan D.W (2009) Neurons in the Frontal Lobe Encode the Value of Multiple Decision Variables. J Cogn Neurosci : 21 (6): 1162–1178.

2 Mayur P., Murat A., Donald A.M., and Amit A. (2021) Where in the Brain Is Depression? Curr Psychiatry Rep. 14(6): 634–642.

3 Martijn Arns et al (2015) Frontal and rostral anterior cingulate (rACC) theta EEG in depression: implications for treatment outcome? Eur Neuropsychopharmacol : 25(8):1190-200.

4 Martin P.P and Angela J.Y. (2012) Emotion and decision-making: affect-driven belief systems in anxiety and depression. Trends Cogn Sci. 16(9): 476–483.

Partager cet article

3 erreurs qui entretiennent la fatigue après un burn-out

Recevez 1 vidéo par jour pendant 3 jours dans votre boîte mail, expliquant chaque erreur en détail.

Picture of Nadia Augusto

Nadia Augusto

Neuroscientifique, explorant les solutions naturelles et durables pour le bien-être du cerveau.

En savoir plus

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Recevoir les 6 clés par email

Recevez des conseils simples et gratuits à mettre en place chez soi pour relancer un cercle vertueux vers la joie et la motivation, avant même de consulter un psychologue.